Stéphane Saglia et Jérome Catz - pro riders et moissonneurs
de poudre - sont de gros veinards. L'un habite Val d'Isère, l'autre
Grenoble, à portée de mains des milliers de mamelons blancs
et de tétons pointus qu'offrent les Alpes. Epargnés par
la crise, ils travaillent dans "leur jardin" chaques jours
de l'hiver : Grandes carves dans la poudre ou cliffjumping, ces spécialités
locales restent appréciés sur le marché et les
cours se maintiennent. Cette saison, les récoltes sont meilleurs
dans le sud, la neige y a mieux poussé...
Mais bon, le sud, comme le nord, c'est vaste! Surtout, le sud, ça
donne des idées, ça fait penser Chaleur, Mer, ... Surf.
Surf! Le mot fatidique est laché. Car Steph et Jérome,
s'ils "travaillent" 6 mois par ans sur la neige, n'en passent
pas moins les 6 autres sur les reefs des îles tropicales à
labourer des corniches dégelées. Et quand on a goûté
à l'eau salée, on ne peut plus s'en passer : trois mois
sans un coup de rame ; ils ont le démon.
Résultat : Après avoir vendangé les Alpes du sud
- le doigt moissonneur descend sur la carte, et atteint le Maroc -,

leur
prochain "contrat" sera le Haut Atlas, avec ses sommets à
4000 pour le snow, et la côte atlantique ouest, avec ses Berbères
et son reef de rocher, pour le surf.

En route
pour un trip snow-surf, dépaysement (délocalisation?)
et coup de soleil (inconvénient du métier?) à 4
heures d'avion de Lyon.
Départ de Lyon, nous arrivons assez en avance pour que la charmante
enregistreuse de bagages ait bien le temps de nous faire payer 600 fr
de supplément de poids (encore une jalouse) mais que voulez-vous,
avec les snowboards et les planches de surf et le 300 mm de Florent...
normal. Le trajet se passe sans problème et nous arrivons à
Marrakech à 22 heures.

Les loueurs
de voitures sont encore ouverts et nous négocions une R5 quatre
vitesses presque neuve, pour un prix dérisoire mais que nous
conserverons secret... La voiture chargée (dans tous les sens
du terme) nous partons à l'hôtel Essaouira, situé
sur la place Djemaa el-Fna, au centre de Marrakech.
Hotel Essaouira, Marrakech.
Il est
minuit quand nous arrivons, mais la ville grouille comme une fourmilière,
nous sommes en plein mois du Ramadan. Pas le temps d'arriver devant
l'hôtel que nous avons déjà un guide au strabisme
impressionnant qui nous colle à la peau direct : Hassan! C'est
lui qui nous emmène manger et nous fait découvrir les
spécialités locales en prenant sa petite (?) commission
au passage. Sur la place, vendeurs de jus d'orange, échoppes
à sandwichs et musiciens se bousculent. Certains groupes de musique
discutent sec pour choisir le morceau qu'ils vont jouer.

Le lendemain, après avoir négocié le prix du gardiennage
de nos surfs en précisant 1000 fois que "attention, c'est
fragile" et changé nos sous, nous passons chercher la voiture
que nous avons laissée dans une des rues voisines de l'hôtel.
A peine montés dedans, un gardien de la rue se précipite
sur nous pour réclamer très fermement les 10 dirhams du
prix du parking. Hassan nous avait dit que ça coûtait 2
dirhams, et après une vive mais rapide discussion, le parking
ne nous coûta que 4 dirhams et un grand coup de latte (de la colère
du gardien) dans l'aile arrière gauche! Vous avez dit agressif?
Il est 13 heures, le ciel est dégagé, la carte à
la main, nous partons vers les montagnes.

Direction
Oukaïmeden, au milieu du Haut Atlas, à 72 km au sud de Marrakech
et qui est LA station de ski du Maroc. La route traverse d'abord de
grands champs tout verts, puis des plantations d'oliviers.

Sur le
bord, les cactus sont chargés de figues de barbarie et après
le dixième troupeau de moutons, ça commence à monter
(il faut savoir que la définition du troupeau au Maroc commence
à 3 moutons avec deux gardiens minimum!).
Vallée de l'Ourika
La route
se resserre et grimpe assez rapidement jusqu'à 2600 mètres,
(altitude de la station), traversant petits villages et éboulis
de gros cailloux à peine écartés du milieu de la
chaussée.

Pas mal
de personnes traînent ou se reposent le long de cette route, attendant
peut-être quelque chose, en nous regardant passer... Ca change
de la ville et donne le ton de la vie dans les montagnes : tranquille,
doucement et pas trop vite!

On arrive
à la station à 15h30, c'est le vendredi et l'hôtel-refuge
du CAF est complet pour le week-end. Nous essayons chez Juju, l'autre
hôtel d'Oukaïmeden, qui nous dégote une piaule in-extremis
grâce à un désistement de dernière minute.
Ici, t'as plutôt intérêt à réserver
si tu viens le week-end.

Nous
partons aussitôt visiter les environs : la station n'est pas immense
mais le cadre est magnifique. Comme les remontées mécaniques
ferment à 16h30, nous décidons de monter à pied
jusqu'au sommet de la première pente pour nous faire notre première
descente au coucher du soleil.

Sur les
contreforts des pentes surfables, il y a plein de petites maisons en
briques de terre séchée qui font office de bergerie, certaines
sont même habitées toute l'année! L'une d'entre
elles nous fournira un bon abri le lendemain, lors d'une des nombreuses
pauses nécessaires au déstressage de l'équipe...

Samedi matin, il fait mauvais, le temps se dégrade rapidement
et la neige se met bientôt à tomber, de beaux gros flocons
bien froids. A peine sortis de l'hôtel, un loueur de mules nous
propose ses services, et bon, pourquoi pas?

Se faire
monter en haut du col qui longe la station à dos de mulet sera
sûrement une expérience intéressante. Si l'on compare
le temps de montée par rapport au temps de descente, nous explosons
tous les records des stations polonaises!
Jérome
Nous
descendons à travers les maisons de terre, drôle d'ambiance.
Une fois en bas et le loueur revenu, nous proposons au gamin qui conduisait
l'une des mules d'essayer le snowboard et il accepte sans hésiter.

Je lui
passe ma planche et une fois ganté il est prêt à
glisser. Plutôt doué le gamin! Une descente pour s'apercevoir
qu'il était goofy et nous avons assisté au début
du premier jibbeur marocain en bottes caoutchouc.

Il était
content de cette expérience mais n'a pas tenu à continuer
trop longtemps... Nous rentrons à l'hôtel pour essayer
de connaître les prévisions météo pour les
jours à venir, mais personne ne sait trop ce qui est prévu,
ici c'est "tout au baromètre" et pour le moment il
est plutôt bas! Coup de chance, nous rencontrons Christophe,
C.
Delval
surfer
et snowboarder de Casablanca qui a un studio dans la station et qui
nous propose de rester chez lui; ça nous arrange et c'est vraiment
sympa de rencontrer les locaux, d'autant plus que nous avons une amie
en commun : Diane Guiauchain, snowboardeuse et grande fana du Maroc.

Nous
passons l'après-midi à jouer au mini curling (passionnant)
et à lire des Paris Match d'il y a 20 ans. Le soir, nous "sortons"
boire un verre au CAF, ambiance barbu décontracté et vu
ce que boivent les collègues, je comprends que le Maroc soit
le 7ème pays consomateur de whisky dans le monde! Retour à
l'appart, pâtes-sauce-tomate, beaucoup plus habituel comme repas,
ça nous change du tajine mouton! 23 heures, tout le monde se
couche, il neige toujours beaucoup et le baromètre reste très
bas. Je règle l'alarme de ma montre pour 8 heures juste histoire
de "checker" le ciel demain matin.

8 heures, j'ai du mal à y croire : il fait grand beau et c'est
gavé! P'tit dej rapide, il y a 15 cm de poudre sur la voiture...
loueur...
On achète
nos forfaits à 80 dirhams (55 francs) et nous sommes les premiers
sur le télésiège qui monte au sommet de la station,
altitude 3257 mètres et 60 de peuf.

On voit
le Mont Toubkal (4167 mètres) qui brille au loin. Je vous laisse
imaginer la suite!
Jérome
Stéphane
Jérome
Stéphane
Jérome
Stéphane
Jérome
Stéphane
Jérome
Stéphane
Jérome
Stéphane
Jérome
Lundi matin nous repartons à Marrakech poser les snowboards et
récupérer les surfs. Après cette journée
d'anthologie, nous sommes près à surfer les vagues de
la côte atlantique et il est vrai que surfer au milieu de l'hiver
est assez tentant (ça fait quatre mois que nous n'avons pas touché
un pain de wax et ça démange!). A la descente, on voit
beaucoup mieux de quoi est fait le bas-côté de la route
: 10 cm et un précipice de 150 mètres... Nous roulons
paisiblement à travers les petits villages de maisonnettes en
terre rouge sombre avec des chèvres sur les toits des habitations.
Il faut faire gaffe aux enfants sur la route, ils courent un peu partout.
Beaucoup d'ateliers de poteries longent la route et de grands étalages
de plats à tajines et autres assiettes colorées fournissent
des réservoirs à cadeaux inépuisables; c'est juste
un peu fragile. Après un court arrêt à Marrakech,
nous continuons vers le sud. Agadir, Taghazout et la pointe des ancres,
Imsouane, la mer, le soleil, la chaleur et tout ça en plein mois
de février! Sur les 270 km qui séparent Agadir de Marrakech
nous avons failli mourir quatre fois à causes des camions qui
se doublent à 20 km/heure en montée dans les virages,
et nous avons passé trois barrages de la police royale (la voiture
de loc avec ses plaques marocaines et nos gueules aidants) sans problème.
Mais il faut être prudent sur la route...
Arrivés à Agadir, nous partons directement à Imsouane,
à 85 km au Nord. Nous avions prévu d'y aller par le nord,
mais le kilomètre 25 au sud d'Essaouira à disparu à
causes des inondations. Une fois sur place, nous avons compris pourquoi
: toute la terre est ravinée par les quantités d'eau qui
sont tombées ces trois dernières semaines (du jamais vu
depuis 80 ans), et même les routes ouvertes à la circulation
disparaissent des fois sur plus de cent mètres sous la terre
et les cailloux. Tout juste de quoi laisser passer un troupeau de chameaux.
A Imsouane, c'est la tempête de vent et nous décidons de
retourner à Taghazout (protégé du vent par le Cap
Rhir) pour y établir notre camp de base : luxueux. Notons que
la notion de luxueux pour un appartement au Maroc signifie grand, propre
(mais pas trop), avec l'électricité, des draps repassés
douteux, des ustensiles de cuisine fonctionnels (mais pas trop), une
salle de bain et basta! Parce que après notre premier petit déjeuner,
et heureusement, notre première crotte, plus d'eau. Et le temps
de trouver le "loule" de la location, de lui expliquer que
la citerne est vide et qu'il la fasse remplir, trois jours se seront
écoulés. Notre premier repas du soir, deux beaux sars
préparés et cuisinés par Stéphane, fût
excellent!

Mais
la vaisselle sans eau, c'est nettement moins drôle... Nous décidons
donc de faire péter le resto quoi qu'il arrive.
Question vagues, nous serons moins gâtés que pour la neige.
Les conditions sont idéales, pas ou très peu de vent,
un bon soleil mais la houle se fait attendre. Nous surferons tous les
jours mais jamais plus d'un mètre cinquante de face. En plus,
la côte marocaine a beaucoup changé cette année
avec les tempêtes qui se sont succédées par ici,
et tout le sable a disparu. Les fonds sont moins bons que d'habitude,
mais ça surfe quand même! De tous les spots (du sud vers
le nord : Banana, la plage de l'école, la Pointe des Ancres,
Mistery, la Source, Killer Point, la Bouilloire et j'en passe),

c'est
Mistery, à 1 km au nord de Taghazout, qui fonctionne le mieux.
Nous ne surferons pratiquement que là. Les vagues sont petites
mais putain, que c'est bon de se mettre à l'eau et de glisser
dans de la flotte à 19° (même en combinaison 3/2)!
En plus Libération annonce de la neige à Nice, Grenoble,
Nantes etc... Ca doit cailler en France...
Après cinq jours passés à surfer et à se
faire bronzer (juste pour énerver les copines en rentrant),

nous
repartons à Marrakech pour prendre notre avion. Même cinéma
qu'à l'aller : supplément de poids pour les sacs, mais
cette fois nous rusons et "oublions" de déclarer deux
housses. Au moment de prendre nos justificatifs pour nos bagages nous
faisons remarquer qu'il manque nos deux housses. Elles passeront à
l'as. On ne nous la fait pas deux fois! Je ne sais pas si c'est pour
se venger, mais Florent attendra un coup de tampon sur son passeport
une demi heure au moins, et embarquera le dernier dans l'avion.
Nous rentrons à bon port le samedi 10 février, le S.I.G.
commence demain...
Moi je vous le dis : les trips, c'est une question de TIMING!Renseignements
pratiques
CAF Michele et Jean Minet
Chalet - Skieur d'Oukaïmeden
60137 Oukaïmaden Maroc
Tel : (212) 4 31 90 36
Fax : (212) 4 31 90 20
Tarifs saison 95/96
Nuitée : cafiste 40 Dhs - invité 70 Dhs
Repas : cafiste 55 Dhs - invité 80 Dhs
Chez JUJU (Mr Loubet)
Hôtel restaurant de l'Angour
60137 Oukïmeden Maroc
Tel : (212) 4 31 90 05
Fax : (212) 4 31 90 06
Tarifs saison 95/96 du 15/12 au 15/04
Pension complète uniquement : 280 Dhs par personne
Autre saison : demi pension possible à 210 Dhs par personne
Hotel Essaouira / Marrakech
Juste à côté de la place Djemaa el-Fna
au centre de Marrakech
Tel : (212) 44 38 05
Tarifs
30 à 40 Dhs par personne
Possibilité de garde des sacs etc...
Taghazout
Hotel "Chez Rachid", devant le petit port.
Tarif : 50 Dhs la chambre.
Vous pouvez aussi loger à "la pointe", en face de la
Pointe des Ancres. Cela permet de ne se déplacer qu'à
pied. Allez à Mistery et demandez aux nombreux surfers qui squatt
quelques informations.
Un guide de voyage indispensable, (quelques soit votre destination d'ailleur),
LONELY PLANET.
Fin janvier,
il ne neige toujours pas en Savoie. Par contre, les dépressions
venant du sud ont plâtré toutes les stations sous le col
du Lautaret...
Le sud disions-nous, ça tombe bien, je reçois un coup
de fil de Stéphane Saglia (on a déjà passé
6 mois ensemble cet été à surfer autour du monde)
qui m'annonce qu'il est prêt à partir pour le Maroc avec
Florent Ducasse, un pote et top photographe de Val d'Isère. Est-ce
que ça m'intéresse, la question ne se pose même
pas! J'ai des copains qui tiennent une agence de voyage à Grenoble
: trois coups de fil et on est d'accord sur les dates; nous décollons
le 1er février, c'est dans quatre jours, un peu précipité,
mais nos passeports sont tous valides, c'est parti. |